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La réduction à une seule dimension,
Infantilisation volontaire ou pauvreté d'esprit ?


hiérarchie
Toute direction se présente comme une machine à simplifier : simplifier les problèmes pour en tirer une position active.
Elle est gourmande de tout outil qui lui permettra de juger avec un seul critère : ramener tout à une valeur en plus ou en moins. Il sera alors facile de donner les instructions qui en découlent.
Bien sûr c'est d'abord l'argent qui sera utilisé mais pas seulement ; le pouvoir peut aussi être recherché pour lui-même.

Ce principe centralisateur crée des difficultés avec l'usage, comme avec tout ce qui est humain ou social. Il entraîne parfois la négation de la particularité qu'il entend traiter.
Forcément incomplet, il va chercher et encourager toute technique de réduction de la pratique qui correspond à sa limite.
Une fois le calcul monétaire critiqué, on va chercher d'autres indicateurs. Ces réductions sont des essais d'élargissement du critère économique. Ainsi, la Responsabilité Sociale et Environnementale des entreprises est-elle réfutées par les décideurs parce qu'elle complique leur travail, en complétant la loi du simple profit par une responsabilité sociale. Mais si la RSE, comme le DPE ou le Nutri-score sont insuffisants pour décrire une réalité qui ne rentre pas dans des cases, ils sont déjà une brèche dans le capitalisme. C'est toute la question du réformisme ...
La volonté de traiter des dimensions non commensurables, par exemple avec l'analyse multicritère, sera de peu de poids face à la facilité d'un affichage unique.

Il y aura bien sûr de faux résultats, mais ce sera ainsi un chantier sans fin de révisions, qui justifiera l'action correctrice.
Les citoyens seront alors suspendus à l'évolution du critère, qui sera le seul qui se présente à la critique et à la revendication : prix, croissance, chômage, performance, CO2, calories ...

Ce simplisme se retrouve amplifié par les média et leur besoin de contraste.
Il s'impose même au marketing et réduit à son tour les techniques de production, qui ne visent plus que le critère défini.

C'est la tendance naturelle du spectacle dominant : le classement en bien et mal ...
et bien sûr la moralisation de toute déviation.
Ça culmine avec la fixation sur une note, ou un seuil, avec tous les effets pervers que l'on connaît.
Et c'est justement sur l'écologie, qui réclame pourtant une vue large, que cette réduction va s'abattre en priorité.

Trois exemples :

Le "nutri-score"
Cet indicateur cumule toute une série de critères en un seul, la "valeur nutritionnelle", représentant un équilibre entre la digestibilité, la légèreté, la toxicité, l'apport calorique, le tout ramené à un rapport entre les nutriments à favoriser et ceux à éviter. Cette formule obscure et toujours à améliorer ne peut que se résumer en une échelle du "bon" au "mauvais". Le consommateur qui cherche à comprendre et à privilégier certains aspects : le sucre, le gras, les nitrites par exemple, ne peut trouver de réponse. C'est une injonction morale qui ne réclame que l'obéissance, confortant encore la faiblesse de l'acheteur.
Y'a bon

Le "DPE" ou Diagnostic de Performance Energétique
Là aussi, un calcul savant et inaccessible pour le profane (et même pour le professionnel) renvoie une valeur globale sur un bâtiment, indépendante de son usage et de sa population. Les résultats sont si variables et si éloignés de la pratique que la construction de l'algorithme est toujours à améliorer. L'incompétence des "diagnostiqueurs" est critiquée, mais pas les limites d'une telle analyse (qui imposent cette incompétence). Les spécialistes de la thermique du bâtiment n'utilisent pas cet outil jugé trop simpliste, mais que l'on impose aux propriétaires et qui permet aux politiques (Il y a ceux qui y croient et ceux qui s'en arrangent) de "flécher" leurs subventions, quitte à éliminer des solutions comme le solaire thermique.

Le "Dispositif" "Crit'air"
Vous pouvez acheter une voiture 4x4 de 300 chevaux avec une vignette "Crit'air 1". Pour peu qu'elle soit hybride et possède en plus de son moteur thermique un second électrique ... Le critère est d'abord celui de l'âge de la voiture.

Enfin, ce simplisme de la gestion ne s'oppose pas à la complication bureaucratique qui prétend ensuite inclure toutes les questions que non seulement elle n'aura pas réglé, mais qu'elle aura complexifié. L'infantilisation des citoyens est autant un présupposé de cette méthode que son résultat.